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coups de fusils, et un geste trop facile à comprendre m’a dit le reste. Pauvre maître, pourquoi nous a-t-il quittés ! Tenez, continua Marcel en pleurant, voilà son héritage.

Mais Théobald ne répondait rien, les yeux sans larmes, et les lèvres livides, il paraissait insensible. En vain Marcel cherchait à l’émouvoir par l’expression de sa propre douleur ; il le contemplait d’un air étonné, et son regard fixe semblait lui dire : Qui pleures-tu ? Cette effrayante stupeur se changea bientôt en un délire affreux, et lorsque le chirurgien arriva, il reconnut tous les symptômes d’une fièvre ardente.

— Dieu soit béni ! dit Marcel, il n’a plus sa tête ; laissez-moi le soigner, entourons-le de tout ce qui peut lui rappeler son ami : qu’il le pleure avec moi : c’est le seul remède à sa souffrance.

Mais le chirurgien ayant déclaré que ces sortes de fièvres étaient fort dangereuses, Marcel consentit à lui laisser passer la nuit auprès de Théobald.

Pendant ce temps, la malheureuse Nadège, revenue à elle, avouait à son père la cause du désespoir où il la voyait, et lui demandait pardon de vouloir mourir. Cédant tour à tour à la colère et à la pitié, Phédor accablait sa fille de reproches et de caresses ; il la suppliait de