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on l’attend ; à force de douleur, on croit le mériter ; et quand l’heure fatale en ravit pour jamais l’espoir, on sent trop que lui seul soutenait le courage.

Ainsi celui de Théobald succomba à la vue de Marcel, pâle, chancelant et portant à la main le manteau et le havre-sac de Léon. L’air consterné du pauvre soldat disait assez le malheur qu’il venait d’apprendre, et Théobald ne se sentit pas la force de l’interroger. Les cris du père de Nadège se faisaient seuls entendre à travers ce silence de mort. Sa fille ne respirait plus, s’écriait-il ; et Théobald, enviant son sort, ne pensait pas à la secourir. Enfin ne pouvant proférer une parole, il fait signe à Marcel de s’approcher. Alors attirée par les cris de Phédor, Alexa arrive ; elle aide son maître à transporter Nadège sur son lit. Pendant ce temps le pope court chez le chirurgien du village, et Marcel, resté seul avec Théobald, lui dit comment un des cosaques pêcheurs qui campent en été sur les bords de l’Ural, ayant trouvé sur la rive ce manteau et ce havre-sac, venait de les lui apporter dans l’espérance d’en avoir plus d’argent que son chef ne lui en offrait.

— D’après ce que j’ai pu comprendre, ajouta Marcel, il a vu un homme, poursuivi par des Baskirs, traverser le fleuve à la nage ; il a entendu tirer plusieurs