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— Et ton père ?

— Ah ! malheureuse, s’écria-t-elle en se cachant le visage.

— Tu le vois, reprit Léon, le remords nous poursuivrait. Songe que le dévouement de ton père m’a sauvé la vie, et que je ne puis sans infamie lui ravir sa fille, son unique bien ; n’abuse pas de tes droits sur mon cœur pour m’ordonner un crime.

— Ne me crains plus, dit Nadège d’une voix étouffée, oui, ta raison m’éclaire, j’allais abandonner mon père pour toi… pour toi… qui ne m’aimes pas !

— Je te résiste, ingrate, et tu dis que je ne t’aimes pas ! Ah ! je te défie de nier le feu qui me dévore ; c’est lui qui te consume, qui t’attire à ton insu vers ce cœur plein de toi. Va, ton amour est l’ouvrage du mien ; mais cet amour que tu insultes, qui te défend contre moi, cet amour qui me fait te sacrifier à l’espoir de te retrouver un jour digne de lui, ne peut, je le sens, braver ton injustice.

En disant ces mots, il serrait Nadège sur son cœur ; mais elle, effrayée de l’égarement peint dans les yeux de Léon, s’arracha de ses bras, et lui demandant pardon d’une voix suppliante, elle lui promit de ne plus douter de son amour.