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— Il ne serait point parti, dit Léon, en prenant la main de Nadège.

Et des pleurs de reconnaissance inondèrent le visage de la jeune Russe. En la voyant ainsi sourire et pleurer, Marcel ne put se défendre d’un moment d’attendrissement, et il sortit de la salle en disant :

— Pauvre petite, elle aurait bien mieux fait de m’aimer.

Mais à peine Léon avait-il vu la joie briller à travers la langueur de Nadège que, tremblant de s’y livrer lui-même, il lui parla pour la première fois des malheurs attachés à leur amour et du serment qu’il avait fait de le sacrifier au repos de Phédor, au bonheur de Nadège.

— Mon bonheur… c’est toi, dit-elle.

— Non, répondit Léon, tu le perdrais sans retour. Je t’aime trop pour t’abuser. Mes devoirs, mon état, ma destinée enfin, tout nous sépare. Je ne m’appartiens pas : ma mère a besoin de moi, il faut que je te quitte pour elle.

— Ah ! laisse-moi te suivre, dit Nadège éperdue, laisse-moi te guider à travers nos routes glacées. Laisse-moi te défendre contre nos soldats furieux. S’ils nous atteignent, je les supplierai à genoux d’épargner ta vie, ou je mourrai avec toi.