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Pour tromper l’ennui d’une si longue captivité, Léon avait imaginé d’en écrire la relation, espérant faire parvenir par les soins de Mikaël ce journal à sa mère ; Théobald, qui dessinait bien, s’était chargé d’y joindre quelques vues des bords de l’Ural, les costumes du pays, et jusqu’au plan des cabanes qu’ils avaient habitées. Un soir qu’il voulait retoucher l’esquisse du village qui leur servait de prison, il s’aperçut qu’il avait égaré son crayon, et pria son ami de lui prêter le sien.

— Je ne l’ai plus, répondit Léon, en baissant les yeux.

— Quoi ! le crayon qui ferme tes tablettes ?…

— Oui, celui que tu m’as donné, celui du souvenir qui renferme le portrait de ma sœur… je ne l’ai plus, te dis-je !

— Tu l’as donc perdu ?

— Non, reprit Léon ; puis, tendant la main vers son ami, ne m’en veux pas, ajouta-t-il d’un ton suppliant.

— Ah ! tu l’as donné, dit en souriant Théobald, et tu crois me sacrifier ainsi impunément ; non, non, je ne puis te pardonner un pareil, sacrifice que s’il t’a rapporté ce qu’il vaut.

— Garde-toi de le croire ; moi, abuser de la ten-