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— Ah ! l’excellente aventure, s’écria Théobald : nous, faire peur à des Tartares ! Crois-moi, il faut apprivoiser celle-ci ; il y va de l’honneur français.

— Vous aurez de la peine, dit Marcel ; s’il n’y avait qu’un dragon de vertu à combattre, on en a vu plus d’un se rendre à discrétion ; mais il vous faut triompher des prédictions d’un sorcier, et, dans ce pays-ci, on croit à la magie autant qu’à l’évangile.

— Et le coquin lui a prédit qu’elle serait victime de l’amour ? dit en riant Théobald, voilà un grand sorcier !

— Tel qu’il est, je voudrais en savoir autant que lui ; les roubles pleuvent sur son grimoire ; on ne perd rien ici qu’on n’aille aussitôt le consulter pour savoir comment le retrouver. C’est lui qui prédit aux jeunes filles les maris qu’elles auront, et cela est d’autant plus facile, qu’on les fiance presqu’en naissant. Dès qu’un Tartare a seize ans, on le marie à une fille qui a souvent dix ans de plus que lui, le tout pour peupler sans perdre de temps ce charmant pays.

— Sais-tu bien que tu voyages avec fruit, dit Théobald, comment fais-tu pour être si vite au fait des mœurs de toute une contrée ?

— J’écoute, je regarde et je questionne ; je ne re-