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Léon, empressés de venger la mort d’un aussi brave général, se précipitèrent dans la mêlée, sans penser que la division, découragée par la perte de son chef, s’était dispersée, et qu’ils combattaient presque seuls contre une armée. Léon, frappé d’une balle, succomba le premier, et Théobald, déjà couvert de blessures, ne pensa plus à se défendre en voyant tomber son ami.

Il espérait la mort ; mais s’adressant aux officiers russes qui, même en l’accablant, ne pouvaient s’empêcher d’admirer son courage :

— Arrêtez, leur dit-il, ma vie vous appartient ; mais je pourrais la disputer encore, et je ne vous demande, pour prix de ma résignation, que la douceur d’embrasser une seule fois mon ami avant de mourir ; ne me la refusez pas.

Ce noble désespoir, l’accent qui accompagnait cette touchante prière pénétrèrent jusqu’au cœur du commandant russe : il ordonna que Théobald fût conduit auprès du corps de Léon, qu’une horde de cosaques s’empressait déjà de dépouiller de ses vêtements. Il fallut les frapper à coups de sabre pour les forcer à quitter leur proie. Mais, ô joie inespérée, à peine Théobald s’est-il précipité sur le sein de son ami, qu’il croit le sentir renaître. Ce n’est point une er-