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le croire… ta mère seule devait s’y tromper. Mon amitié pour Nadège, l’amour qu’elle garde à Léon, et ce triste souvenir dont nous ne parlons jamais sans attendrissement, tout devait lui donner le change sur nos vrais sentiments…

— Nadège aimait Léon ? interrompit Céline, pourquoi ne me l’avoir pas dit ? cela m’aurait épargné bien des larmes.

— Ah ! ne me les reproche pas ces larmes qui m’apprennent que je te suis cher ; elles compensent toutes mes peines ; le souvenir en deviendra ma vertu, mon courage, contre le malheur qui m’attend ; je leur devrai jusqu’à la force de te quitter, car je saurai que tu me pleures.

— Oui, je la pleurerai, cette cruelle absence ! mais, Théobald le voit, je ne puis plus feindre. Hélas ! je m’étais promis de le guérir de son amour, en lui cachant celui qu’il m’inspirait, et la crainte de le perdre m’a fait oublier toutes mes résolutions. Je frémir en pensant que j’ai été vingt fois prête à me trahir, à le livrer au courroux de ma mère ; je sais, enfin, que ma raison ne peut plus me guider, et j’implore la tienne, dit Céline, en laissant tomber sa tête sur le bras de Théobald.