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égaré passent pour être l’effet d’un rêve pénible interrompu brusquement. M. de Rosac lui raconte comment elle s’est endormie sur le bras de son frère, et, sans s’apercevoir de la rougeur qui couvre alors le front de Céline, il lui dit combien il avait envié, pendant ce moment, ces droits de la fraternité qui avaient permis à Théobald de la presser si longtemps sur son cœur, et cent discours de ce genre qui la mirent au supplice, et l’indisposèrent injustement contre Théobald. Mais M. de Rosac ajouta :

— Eh bien, le croiriez-vous ? cette faveur que j’aurais payée de ma vie, Léon en faisait si peu de cas, que, sans madame votre mère, il vous posait tout doucement dans le coin de la voiture, au risque de vous rompre le cou. Ah ! la fraternité est une belle chose !

Ces mots désarmèrent Céline, et valurent un regard reconnaissant à Théobald. Mais cet événement, quoi que fort simple, jeta un grand trouble dans l’âme de Céline. Elle était déjà résolue à ce qu’il ne fût plus question d’amour entre eux. Elle se décida encore à fuir toutes les occasions où elle serait forcée de lui témoigner une amitié fraternelle, et c’est dans toute la bonne foi de son âme qu’elle crut triompher bientôt d’un sentiment qui l’exposait à tant de honte.