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Révolution n’étaient point venues éprouver son courage. Mais dans ce chaos d’actions extravagantes et de sages principes, d’audace et de frayeur, de lâcheté et d’héroïsme, Eribert avait, pour ainsi dire, perdu le cœur et la raison ; comme plusieurs autres, il s’était fait bourreau de peur d’être victime. Sans pitié pour tout ce qui l’avait ému dans sa vie, la crainte de paraître sensible aux cris de désespoir qui retentissaient de toute part, le rendait plus barbare encore ; car le moindre signe d’attendrissement pouvait le dénoncer lui-même, et le conduire sur cet échafaud quotidien dont l’image le frappait d’un terrible pressentiment. Hélas ! il ne le couvrait de tant de victimes que pour s’en dérober l’aspect épouvantable.

Mais si la peur, ce démon des âmes faibles, les délivre parfois d’un danger, c’est pour les précipiter dans un péril plus grand encore. En se faisant la créature, l’instrument des tyrans de cette époque, Eribert se trouva enveloppé dans l’arrêt qui en fit justice ; et le 9 thermidor rendit Théobald orphelin.

Les désordres de la Révolution n’ayant ni accru ni diminué la fortune de son père, l’héritage qu’il en recueillit, joint à celui de sa mère, lui composèrent un revenu de quinze à seize mille francs. La moitié de