Page:Nichault - Le Faux Frère.pdf/158

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

reçu le serment. Ah ! c’est au nom de ce frère chéri que je réclame mon pardon.

— Et suis-je donc en état de juger votre conduite ? reprit Céline ; puis-je m’occuper de vous et de moi, quand je pressens le désespoir de ma mère ? Que deviendra-t-elle, lorsque mon oncle… Là, des sanglots étouffèrent la voix de Céline. Non, reprit-elle avec force… sa vie avant tout… et si je ne puis la sauver, qu’elle meure du moins heureuse… Moi seule je serai coupable, et le courroux de mon oncle ne tombera que sur moi. Ah ! Théobald, ajouta-t-elle avec l’accent de la prière, si vous m’aimez, soyez encore son fils ; oubliez ce malheureux amour qui ne doit jamais être sanctifié, cet amour qui nous placerait aujourd’hui dans une situation déshonorante. Enfin, rendez-moi mon frère.

— C’est demander ma vie, reprit Théobald ; car le sacrifice de cet amour n’est pas en ma puissance : avant même de te voir, ne l’avais-je pas vainement combattu ? et depuis que je suis ici, depuis que ta présence en a fait un délire, combien de fois n’ai-je pas tenté d’en triompher ? Va, si les reproches que je m’adressais, si les humiliations qu’il m’a fallu supporter, si ton intérêt même n’ont pu l’étouffer en mon âme, il est indestructible.