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que l’on croyait morts. M. de Rosac raconta qu’un de ceux-là étant arrivé inopinément chez sa femme, l’avait trouvée établie conjugalement avec un autre ; qu’il s’était fâché ; mais que la femme, armée d’un extrait mortuaire bien en forme, l’avait contraint de chercher ailleurs un asile.

— Vous verrez, ajouta M. de Rosac, que cette misérable guerre de Russie amènera une quantité de procès de ce genre ; tant de soldats ont été retrouvés morts dans les neiges, et tellement défigurés, qu’on a bien pu se tromper sur leur nom ; sans compter que ceux qui n’étaient pas satisfaits du leur, pourront facilement le changer contre celui d’un autre à la faveur de tout ce désordre. Et Dieu sait comment les fripons et les intrigants vont en profiter.

À ces mots, une rougeur subite couvrit le front de Théobald. Emporté par un mouvement irrésistible, il dit :

— Peut être aussi cette faculté de passer pour un autre, servira-t-elle à quelque bonne action ; l’arme qui assassine peut aussi défendre la vie d’un honnête homme, et tout dépend de la main qui s’en sert.

— Soit, reprit M. de Rosac, mais croyez bien qu’une semblable ruse ne protégera jamais l’innocence. À