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d’elle à table sans même attendre qu’on l’y invitât.

Théobald s’étonna d’abord de voir le cérémonial habituel du baron s’arranger, pour ainsi dire, si bien, du sans façon de M. de Rosac. Mais cette indulgence lui fut bientôt expliquée par l’exception que l’élégant bordelais faisait en faveur de M. de Melvas. Jamais il se lui adressait la parole qu’avec tous les signes d’un respect exagéré ; comme cette retenue n’était point dans ses habitudes, elle passait toutes les bornes et donnait à sa conversation avec M. de Melvas un ton de soumission servile, qui ressemblait à celui d’un subalterne avec son chef. Mais il était facile de remarquer que M. de Melvas lui savait gré de cette distinction, et que, tranquillisé pour sa part sur les familiarités, les inconvenances de M. de Rosac, lui permettait d’en accabler sans pitié tous les autres.

Cependant M. de Rosac ne manquait ni d’esprit, ni d’instruction ; mais la gaucherie et l’assurance lui prêtaient souvent l’air et les manières d’un sot.

Fils d’un conseiller au parlement, autrefois fort riche, et qui avait perdu une partie de sa fortune dans l’émigration, il se destinait à suivre la carrière de son père, et déjà quelques succès, quelques causes plaidées avec éclat, lui avaient donné la plus grande idée de