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personne là pour dénoncer sa sottise, je ne serais pas étonné que cette belle Céline ne le crût l’homme le plus distingué du monde. Mais je ne me trompe pas, le voilà qui entre dans sa loge… Voyez comme on l’accueille, c’est lui qui l’épousera, vous dis-je.

Cet arrêt fit soupirer Théobald, et fixa son attention sur le jeune élégant appelé à tant de bonheur. C’était un de ces beaux hommes, bien communs, bien colorés, à qui une grande taille et des traits à demi réguliers donnent le droit de se faire admirer par les femmes qui regardent la distinction comme un objet de luxe. Il faut avoir habité la province pour savoir à quel point ces séducteurs ont raison d’être avantageux. Mais ce n’était point un vainqueur de ce genre que Céline devait soumettre ; Théobald ne pouvait le croire, et cependant il la voyait sourire quand M. de Rosac lui adressait la parole ; elle accepta le bouquet qu’il lui offrit ; c’est encore à lui qu’elle donnait le bras à la sortie du spectacle ; toutes ces preuves de préférence jetaient l’esprit de Théobald dans un doute cruel. Il résolut d’en sortir le plus tôt possible, et dès le lendemain, après s’être assuré du départ de Céline et de son oncle, il se mit en route pour se rendre le soir à Melvas.