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peindre, que des tourments dont il faisait l’aveu.

Pendant cette représentation, la bruyante admiration des Bordelais était à son comble. Théobald seul gardait le silence. Le dos tourné à la scène, et les yeux fixés sur un point de la salle, il recevait toutes ses impressions de celles qu’on lisait sur un visage ravissant, et qui, plus d’une fois, se couvrit de larmes aux accents passionnés de Pharan. De pénibles réflexions assiégèrent l’esprit de Théobald en contemplant la douce sérénité de cette jeune et belle personne dont le sourire gracieux succédait si vite à l’expression d’une tendre pitié.

— Aurais-je bien le courage, pensa-t-il, de faire naître la pâleur sur ces traits charmants ! d’éteindre ce regard si vif sous un déluge de larmes ! Ah ! que ne puis-je garder pour moi seul les regrets dont je vais l’accabler ! Le jour où j’ai perdu Léon n’était donc pas le plus malheureux de ma vie, puisqu’il me restait encore à désespérer sa sœur.

L’attraction du regard est un mystère inexplicable, mais qu’on ne peut nier ; je ne sais quoi nous avertit de l’observation dont nous sommes l’objet, et il arrive souvent que nos yeux se sentent attirés comme par une force supérieure vers ce regard qui nous obsède. C’est ce qu’éprouva Céline, et ce qui fit presque déli-