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per à la méchanceté qu’elle se retire à la campagne. Madame de Varannes fait le plus grand éloge de son caractère ; ses principes, dit-elle, ramèneraient à la vertu la créature la plus pervertie ; sa piété, sa morale et son esprit, en font une femme aussi vertueuse qu’aimable. Ce portrait doit être ressemblant, car elle la connaît depuis un grand nombre d’années ; moi je n’ai lu que ses ouvrages, et je me garderais bien de juger son cœur sur les productions de son esprit ; non pas qu’il soit dépourvu d’agrément : son style est généralement pur, ses idées sont rendues avec clarté ; mais je ne les trouve pas toujours justes, et nous différons d’opinion sur plusieurs sujets ; au reste, la mienne n’est pas d’un assez grand poids pour faire tort à sa réputation, et ce n’est qu’à toi que j’en veux parler.

Il approche ce triste jour, ma Juliette, cet anniversaire du jour le plus funeste de ma vie. Déjà sont commandés tous les apprêts de la fête funèbre : j’ai fait élever un tombeau dans la petite île qu’on aperçoit de mes fenêtres ; il est bâti sur un modèle antique, et surmonté d’une urne de bronze, sur laquelle est gravée cette simple inscription :

« Henri vécut pour le bonheur de Laure ! et Laure a tout perdu… »

Ce monument est entouré de cyprès et de toutes les plantes que la nature semble destiner à servir la