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tôt, de laisser ma chère Lucie presque seule, et au moment de me donner un fils. Cette séparation sera cruelle, et je m’adresse à vous pour soutenir le courage dont ma Lucie aura besoin, et pour me sauver bien des inquiétudes, en vous engageant à lui donner vos soins dans l’instant où sa vie courra quelque danger.

Le son de sa voix attendrie, le ton suppliant qu’il mit dans cette prière, et plus encore l’inclination qui m’entraîne vers Lucie, m’engagèrent à lui répondre de manière à le tranquilliser sur tout ce qu’il pouvait craindre.

— Partez, lui dis-je, puisque tant de raisons vous y obligent ; je vous jure, par l’amitié que je porte à Lucie, à l’époux qui fait son bonheur, par mon enfant (et ce serment est sacré), de ne pas quitter cette amie tant que ma présence lui sera nécessaire. Je partagerai mes soins entre elle et ma famille ; et je viendrai m’établir près d’elle au moment où ses douleurs l’avertiront d’une félicité prochaine. C’est dans mes bras que sera déposé votre enfant ; c’est moi qui le porterai sur le sein de sa mère ; et c’est encore moi qui recueillerai toutes les expressions de son amour pour vous les répéter, et vous faire oublier par ce récit les tourments de cette absence.

— Oh ! femme divine, s’écria-t-il, vous me sauvez la vie, et je souffre de ne pouvoir vous exprimer les