Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pour une femme méprisable !… Elle pourrait me soupçonner d’infidélité, et je croirais mourir deux fois en perdant son estime. Dites-lui plutôt que j’ai péri dans la bataille livrée dernièrement aux Impériaux. Dites-lui surtout que je ne regrette au monde qu’elle et ma famille. Hélas ? sa tendresse faisait ma félicité, et l’idée des chagrins qui vont déchirer son cœur, est celle qui m’oppresse le plus.

« — Suis-je assez à plaindre !… interrompit Delval, et le sort croit-il m’avoir épargné, en te frappant pour moi ?… Ordonne, ô mon digne ami, et tes vœux seront satisfaits !

« Henri lui dicta toutes ses volontés, se tournant vers moi :

« — Vous avez connu mon jeune frère, reprit-il : il m’a souvent parlé de l’amitié qu’il vous inspira pendant l’année que vous passâtes ensemble ; rappelez-vous Frédéric de Varannes.

« — J’ai tué le frère de mon ami, laissez-moi le venger ?…

« En disant ces mots, je me frappais la poitrine ; j’étais dans les convulsions du remords. Henri, épuisant le reste de ses forces à calmer mes transports, employa le seul moyen capable de m’empêcher d’attenter à ma vie.

« — Tu ne peux rien me refuser, me dit-il d’un ton solennel ; écoute les dernières volontés d’un