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être déjà à Strasbourg. Je m’y rendis aussitôt ; je descendis à l’hôtel de l’Empereur. L’hôte me dit que le chevalier Delval avait amené la veille une jeune femme chez lui, qu’ils y logeaient tous deux ; je demandai à les voir ; on me répondit qu’ils étaient au spectacle ; je m’y traînai dans un état impossible à décrire, et la première personne que j’aperçus en entrant, fut milady, assise à côté d’un officier français. Je me fis ouvrir sa loge, j’y entrai brusquement ; j’accablai la perfide de reproches, d’injures ; j’insultai celui que je croyais mon rival, et je n’ose vous dire à quel excès la rage m’emporta. La scène devint si vive, que l’officier, traité par moi de lâche, sortit à l’instant pour se venger de son indigne agresseur. Nous nous rendîmes sur les remparts : c’est là, qu’à la suite d’un affreux combat, la fureur triompha du courage, et l’injustice du véritable honneur.

Ma rage s’éteignit bientôt en voyant tomber mon adversaire ; j’oubliai les torts que je lui supposais, et je me précipitais vers lui pour lui offrir des secours, quand milady et le chevalier arrivèrent ; celui-ci, frappé du spectacle sanglant qui s’offrait à sa vue, jeta un cri de désespoir. Un mot de milady m’instruisit de ma méprise ; je sus que Delval, ne pouvant l’accompagner au spectacle, avait chargé le marquis d’Estell de lui donner la main ; et convaincu d’avoir commis un crime exécrable, je voulus me