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peine, lorsque jetant les yeux sur ma table j’ai aperçu la clef que James m’a remise dans son délire. Frappée de cette vue, elle m’a reportée au moment même où il me la donna. J’ai senti renaître mon agitation… et c’est au milieu de ce trouble que je t’ai fait le récit du plus doux et du plus cruel événement de ma vie…

Que dois-je penser de ce mystère ?… de ce crime qui le sépare de moi ?… Oh, mon amie ! aurait-il formé quelque honteux lien ?… Cette veuve… cette milady Léadnam, serait-elle son épouse ?… Aurait-il payé sa possession par une action indigne de lui ?… Ah ! loin de moi cette coupable pensée !… Mais, d’où naît son égarement ?… Pourquoi s’être imposé la loi de ne jamais céder à sa passion ?… de mourir plutôt que de s’unir à l’objet de sa tendresse ?… et cela quand l’amour le plus pur répond au sien !… Quand tout semble se réunir pour mettre le comble à sa félicité !… Mais que je suis insensée de m’affliger ainsi… N’ai-je pas vu que sa raison l’avait abandonné ? M. Billing ne l’a-t-il pas remarqué comme moi ?… Et dois-je prendre pour certain tout ce qu’il lui fut inspiré par ses transports délirants ?… Non, ma Juliette, je ne veux penser qu’au bonheur d’en être aimée… Je veux croire que son serment à Frédéric l’a seul porté à combattre son amour… Qu’il regarde comme un crime l’aveu