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remords et à la misère ; vous venez de la ranimer en me donnant l’espoir d’en faire un meilleur usage. Je ne suis donc pas vouée au mépris universel, puisque deux êtres aussi vertueux daignent s’intéresser à moi ?

Ses larmes l’empêchèrent d’en dire davantage ; elle parut s’affaiblir… M. Bomard s’empressa d’aller chercher quelque boisson cordiale qui pût la soutenir, car la malheureuse nous avoua qu’elle n’avait rien pris depuis deux jours. Quand ses forces lui revinrent, je chargeai M. Bomard de la conduire à notre auberge, pendant que je ferais un conte au capitaine, pour lui expliquer la nouvelle résolution que mademoiselle Thérèse avait prise de ne pas partir. Je le rencontrai sur le pont, il se trouva fort honoré de ma confidence ; il alla jusqu’à me promettre le secret sur cette aventure en disant :

— Je me doutais bien que ce beau jeune homme ne la laisserait pas partir. Il avait trop peu fait pour retarder mon voyage.

Je n’eus pas l’air d’entendre ce qu’il voulait dire, et je rejoignis Caroline et M. Bomard. Celui-ci me dit lorsque j’entrai :

— Nous avons rempli la moitié de notre mission ; il faut, sans perdre de temps, nous occuper de l’autre, et ce soin me regarde. Je connais un honnête laboureur qui demeure à six lieues d’ici, dont la famille