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c’est là que, baignée de mes larmes, j’invoquerai son ombre ! c’est là que j’obtiendrai du ciel le pardon dû à mon repentir, et le courage de surmonter ma faiblesse.

Depuis que j’ai reçu ta lettre, je n’ai cessé de pleurer ; d’abord j’ai voulu combattre tes raisons ; j’ai voulu douter de mon malheur : moi de l’amour ! me disais-je, quand le souvenir de mon époux occupe encore si vivement mon cœur, quand les caresses de ma fille me le rappellent à tout instant ! Ah ! Juliette se trompe, les vertus de James lui ont attiré mon estime, et ses malheurs ma pitié. Cet intérêt est vif, sans doute ; mais il l’inspire à tous ceux qui le connaissent, et j’ai dû le ressentir comme eux. Rassurée par cette réflexion, j’allais chercher à détruire ton erreur, en t’assurant qu’il ne me coûterait rien de retournera Varannes, et que l’empressement que j’allais mettre à mon retour te prouverait mon indifférence, quand tout à coup mon cœur se gonfla : je sentis redoubler son oppression à la seule idée de me séparer de lui. Je ne le verrai plus, me dis-je ; ce mot fit tomber le voile qui me cachait à moi-même, je vis son image empreinte dans mon cœur ; et récapitulant toutes mes actions depuis un certain temps, je reconnus qu’elles n’avaient été dirigées que parle désir de lui plaire. Ah ! ma Juliette !… que cet aveu ne me fasse rien perdre dans ton estime ; je ne le