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qu’un homme de ce caractère ne fortifiait pas assez les idées religieuses dans l’âme de ceux qu’il instruisait, et qu’en leur donnant des lumières au-dessus de leur état, c’était leur inoculer les principes dangereux de la philosophie moderne, elle se vit dans l’impossibilité de réfuter d’aussi bonnes raisons, et fut de son avis. Tu devines l’effet que produisit ce discours sur la fille d’un ami de ces mêmes philosophes, dont les principes font horreur ; celle qui, ayant été élevée dans leur société a pu juger du motif qui conduisait leurs plumes, et qui les a vus braver toutes les puissances pour chercher la vérité et frapper de sa lumière ceux qui s’obstinent à la méconnaître ; mais j’ai senti que je me donnerais un ridicule en répondant à l’accusation de l’abbé ; j’ai fait réflexion qu’il avait trop d’esprit pour penser ce qu’il venait de dire, et que le raisonnement ne pouvait rien contre la mauvaise foi ; d’ailleurs, qu’aurait imaginé madame de Gercourt, en voyant une personne de mon âge se mêler de répondre à un sophisme aussi sérieux ; elle qui, dans ses ouvrages, interdit aux jeunes femmes la permission de parler sur aucune passion ! qui les croit déshonorées quand elles ont fait imprimer une romance ; et qui appelle Athées toutes celles qui osent douter d’un seul miracle ? J’avoue qu’elle est moins scrupuleuse pour les femmes de son âge ; elle leur permet d’écrire, mais seulement