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Alors, d’autres regarda s’échangèrent, et le sourire qui les accompagna disait :

À Saint-Germain, pour être plus à portée des rendez-vous de chasse : cela s’explique maintenant.

Mais la réponse de madame de la Tournelle déconcerta la malice des dames. En parlant de son projet devant elle, ce n’était pas risquer de le faire connaître au roi ; elle était bien sûre qu’aucune d’elles ne voudrait le lui apprendre, tant on aurait à craindre qu’il ne s’y opposât ; d’ailleurs, elle n’avait point dit quel jour était fixé son départ de Versailles. Ce ne fut qu’en reconduisant sa sœur qu’elle l’engagea à l’accompagner le lendemain même à Plaisance.

Madame de Flavacourt, que les soirées de la reine ennuyaient beaucoup, se réjouit d’aller passer quelque temps dans un lieu charmant, à l’abri des sermons et de l’étiquette.

La soirée du roi commençait juste au moment où celle de la reine finissait, et madame de la Tournelle, trouvant qu’il était de trop bonne heure pour se coucher, se mit à écrire au duc de Richelieu pour lui apprendre son départ et lui répéter les motifs qui l’engageaient à fuir la cour. Comme cette lettre n’apprenait rien à M. de Richelieu, il devinerait sans peine qu’elle était plus pour le roi que pour lui, et madame de la Tournelle se félicitait d’avoir trouvé cet ingénieux moyen de faire connaître au roi sa pensée. Elle finissait par faire entendre qu’une jeune veuve ne pouvait vivre à la cour sans être en butte à toutes les calomnies, et qu’elle n’y reviendrait que le jour où elle serait vraiment sa nièce.

C’était faire pressentir son mariage avec le duc d’Agenois. Quand elle eut fermé cette lettre, qui ne devait être remise que lorsque madame de la Tournelle serait à Plaisance, elle ouvrit sa fenêtre, car elle éprouvait une douloureuse oppression, et ses larmes coulèrent en contemplant ce palais, ce parc admirable qu’elle ne reverrait peut-être pas de longtemps. C’était l’heure du souper du roi ; madame de Mailly était avec lui sans doute, car elle avait tant pleuré pour conserver sa place à tout prix, que le roi n’avait rien changé à ses habitudes, si ce n’est que cette intimité sans amour avait pris le caractère d’une conjugalité insipide. Mais il croyait devoir faire ce sacrifice à la paix