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de croire aux espérances que voulait lui donner mademoiselle Hébert. Ma sœur ne se doute de rien, ajouta-t-elle ; il fondrait sortir sans être vins d’elle ni du chevalier de Mailly ; avez-vous là cette robe d’indienne, le mantelet et la cornette de batiste que vous deviez emprunter à la fille du concierge ?

— Tout cela est dans le cabinet de toilette de madame ; quant à madame la duchesse de Lauraguais, elle doit se rendre à l’hôtel de Brancas pour y dîner avec sa belle-mère, qui est malade ; elle compte revenir ici de bonne heure, mais elle ne prévoit pas qu’elle ne pourra traverser le cortège ni la foule.

— Ne l’en avertissons point, et soyons prêtes à sortir aussitôt après son départ* surtout cachons-nous bien du chevalier de Mailly, car le pauvre homme est si inconsolable du mal qu’il m’a fait sans le vouloir, qu’il se ferait tuer pour moi, et je ne veux pas qu’il me suive.

— Il est certain que madame a dans M. le chevalier un zélé défenseur : il ne faudrait pas se jouer à mal parler d’elle devant lui : depuis qu’il occupe le petit appartement que madame lui a donné ici, il se fait raconter chaque jour, par tous les domestiques, les bonnes actions de madame la duchesse, et les raisons qui la font chérir de tout ce qui l’entoure ; et ils les interrompt sans cesse en disant : « C’est un ange, un véritable ange : ah ! si quelqu’un l’insultait devant moi !… »

— Il me vengerait de lui sur un autre, interrompit la duchesse, c’est ce que je veux éviter : car il est possible que, maigre ce déguisement, je sois reconnue par quelque espion des ministres, et livrée à la risée ou à la fureur de la populace. Si cela arrive, ne prenez pas mon parti contre la foule, ce sérail vous perdre sans me sauver, ma chère mademoiselle Hébert. Fuyez alors, et ne me plaignez pas, j’ai si souvent demandé à Dieu ce beau jour, je voudrais tant qu’il fût le dernier de ma vie.

— Ah ! madame oublie qu’elle m’a promis de ne plus parler de…

— Oui, vous avez raison, je ne veux plus penser à ce qui m’attriste.

Alors la duchesse fit l’essai de sou costume bourgeois.

— Il est certain que l’on reconnaît encore trop le visage