Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/241

Cette page n’a pas encore été corrigée

riorités du royaume, la duchesse de Châteauroux avait soin de les réunir chez elle ; et de son côté le roi, sachant tout ce que méritait son noble caractère, se plaisait à lui attirer les hommages, les respects qu’on accorde quelquefois aux qualités supérieures, mais toujours à la puissance.

On ne peut mieux donner l’idée de l’empressement des plus grands personnages à témoigner leur admiration pour la duchesse de Châteauroux, et a flatter le roi dans son amour pour elle, qu’en citant ce trait de Frédéric II, qui, voulant former une alliance secrète avec le roi de France contre l’Angleterre, négocia avec M. de Courten, envoyé de France à Berlin, lui donna son portrait enrichi de diamants, le chargea d’une lettre spirituelle, flatteuse, comme il savait les écrire, et tout cela pour obtenir de Louis XV la permission de faire prendre une copie du beau polirait de la duchesse de Châteauroux fait par la Tour[1] ; désirant, ajoutait le roi de Prusse, parer la galerie de Potsdam de l’image de la plus belle et de la plus spirituelle de toutes les femmes.

L’étiquette voulait que madame de Châteauroux fut présentée au roi, à la reine, à la famille royale, en qualité de duchesse de Châteauroux. Le roi exigea que cette présentation fût faite avec appareil par la duchesse de Lauraguais, un jour de grande réception, en présence de huit dames dont cinq titrées et assises comme elle, les duchesses de Duras, d’Aiguillon, etc.. et trois debout, madame de Flavacourt. madame de Rubempré et madame de Maurepas.

C’était une petite vengeance que le roi exerçait contre cette dernière, qui faillit mourir de dépit. Fatigué des preuves d’une haine acharnée que le généreux silence de madame de Châteauroux ne parvenait point à modérer, Louis XV, ne pouvant sévir contre Maurepas et sa femme sans déplaire à madame de Châteauroux, résolut de placer cette dernière assez haut pour qu’il leur fût impossible d’arriver jusqu’à elle.

— J’ai trop souvent remarqué l’effet de cette Fièvre d’envie, disait le roi à la duchesse ; on ne l’apaise point par des ménagements ; il faut la frapper, l’éblouir, mettre enfin tant de distance entre l’envieux et l’objet de sa rage

  1. Campagnes de Louis XV. — Mémoires de Richelieu.