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les feux allumés autour de cette tente, malgré les épaisses fourrures qui servaient de tapis, le roi prétendit que la saison ne permettait pas d’y séjourner plus longtemps ; et après avoir fait les honneurs d’un déjeuner splendide, après avoir fait offrir le pied du cerf sur un plat de vermeil à madame de la Tournelle, le roi exigea de ses belles invitées qu’elles allassent se chauffer au château de Plaisance ; puis il parla de se rendre à Versailles, où l’heure du conseil le rappelait.

La mode était alors de porter un petit manchon fort élégant suspendu par des rubans à une riche pelisse. Celle de madame de la Tournelle était en satin blanc, garni de martre zibeline : c’était la duchesse de Mazarin qui la lui avait donnée.

— Voici, dit le roi, une fourrure aussi belle que celle dont Zaïd Effendi m’a fait présent.

En disant ces mots, il prit le manchon, qui était aussi en martre, comme pour l’admirer de plus près, et il le rendit ensuite à madame de la Tournelle.

En le reprenant, elle sentit un petit papier roulé dans le taffetas de la doublure ; et elle rougit de manière à ne laisser aucun doute au roi sur le sort de son billet. Il ne pouvait plus risquer de tomber en d’autres mains.

L’ordre du départ étant donné, les écuyers du roi amenèrent son cheval à l’entrée de la tente.

Après avoir salué toutes les femmes, Louis XV dit en passant près de madame de la Tournelle :

— J’ai votre parole, madame, ne l’oubliez pas.

Puis il partit au galop sur le plus beau cheval de France. De retour à Plaisance, où madame de la Tournelle brûlait de revenir pour aller s’enfermer dans sa chambre et lire ce billet dont elle pouvait sans peine deviner le contenu, elle aperçut sous le vestibule plusieurs domestiques à la livrée du roi : ils étaient porteurs d’un magnifique nécessaire de vermeil pour M. Duverney, en reconnaissance de celui qu’il avait prêté la veille au roi.

Louis XV, prévoyant que la réflexion, toujours du parti le plus sage, pourrait bien ramener madame de la Tournelle à son projet de rester éloignée de Versailles, le combattait de nouveau dans sa lettre, et cela par les mêmes raisons ; par ces assurances si vraies, si douces qu’on relit, qu’on entend