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Le lendemain, lorsque Lucien vint savoir des nouvelles de la malade, on lui dit qu’elle allait beaucoup mieux et qu’elle désirait le voir.

Il la trouva sur son canapé, vêtue d’une robe noire, d’un châle de même couleur ; ses beaux cheveux étaient nattés comme pour attendre un chapeau, enfin, sans sa pâleur extrême et l’air souffrant qui perçait à travers son attitude calme, on l’aurait crue au moment de sortir.

— Grâce à Dieu, je suis en état aujourd’hui de vous exprimer, cher Lucien, tout ce que m’inspire de reconnaissance votre…

— Ne parlons pas de cela, interrompit M. de la Menneraye. En me rendant à vos ordres, je n’ai rien fait que pour moi. Un de nos amis communs, las de combattre avec sa raison contre ce qu’il appelle ma folie, a fini par la prendre en pitié, et s’est chargé de m’instruire de toutes vos actions, même des motifs qu’on leur prêtait. Il espérait sans doute plus de cette relation fidèle que de ses sermons philosophiques. Il est certain que tout ce qu’il m’apprenait de vos sentiments pour M. de Rheinfeld aurait dû me guérir ; eh bien , le croirez-vous ? chaque preuve de dévouement pour cet homme si spirituel vous embellissait encore à mes yeux. — Comme elle sait aimer ! me disais-je. Quel noble aveuglement l’entraîne ! Ah ! pourquoi faut-il tant de talent, de célébrité pour lui plaide ? Pourquoi Tes agitations de l’incertitude, la crainte d’une trahison, les prévisions d’un malheur humiliant, sont-ils nécessaires à la vie de son âme ! à cette fièvre qu’on ne peut ni donner, ni éteindre, qui n’aît d’un regard, qui vît d’obstacles, de tourments, d’injures, et qui, jouet de la fatalité, n’obéit qu’à elle. Mais cette fatalité qui soumet aujourd’hui Ellénore à une