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sorte de défiance qui nuisait à son bonheur. L’assurance d’une sincère amitié lui semblait une politesse, l’éloge une flatterie, et le serment un mensonge. Cependant son âme tendre ne pouvait se passer d’affections vives. Mais la dévotion la plus exaltée les avait toutes concentrées, jusqu’au moment où M. de Saverny vint mériter son attachement et sa reconnaissance, et lui prouva qu’un homme, élevé dans de bons principes, peut se conserver vertueux au milieu du grand monde ; mais soit faiblesse, ou prudence, il ne chercha point à détruire les préventions qui la rendaient souvent injuste envers les autres hommes. Peut-être avait-il prévu qu’en mettant son esprit à l’abri des dangers de la séduction, elle n’en aurait encore que trop à vaincre pour son cœur. Une longue habitude du monde avait démontré à M. de Saverny que le plus grand malheur d’une femme n’est pas de succomber au sentiment qu’elle éprouve, mais au caprice qu’elle inspire ; et sa tendresse vraiment paternelle pour Valentine, avait voulu la préserver du malheur si commun d’être dupe de la vanité d’un fat ou de la légèreté d’un étourdi.



V


Les premiers jours qui suivirent l’arrivée de madame de Saverny à Paris, furent entièrement consacrés à des visites de famille que son frère avait exigées avant tout, et aux différentes emplettes des