Page:Nichault - Anatole.djvu/271

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sans étonnement qu’il vient de partir pour l’Opéra. Un valet de chambre est appelé, il confirme cette réponse, et dit qu’en effet son maître s’est déterminé tout à coup à sortir après avoir reçu un billet.

— Et savez-vous de quelle part il venait, interrompt vivement le commandeur ?

— Non, monsieur. Je sais seulement qu’un domestique, portant la livrée de madame la marquise de Saverny, m’a chargé de le remettre à mon maître.

Ces mots augmentent encore la surprise de M. de Saint-Albert. Il veut éclaircir le mystère, et se rend sans délai à l’Opéra. En entrant dans la salle, il aperçoit Anatole dans le fond de la loge de l’ambassadeur d’Espagne. Il le voit debout, appuyé sur une colonne, et les yeux fixés de manière à lui indiquer l’endroit où se trouve madame de Saverny. Le commandeur tourne alors ses regards de ce côté, et il est frappé de l’air rayonnant de Valentine. L’émotion la plus vive semble animer ses traits, et tout en elle démontre autant de trouble que de joie. En vain la plus célèbre danseuse captive l’attention du public, Valentine profite de ce moment pour se livrer au plaisir de revoir Anatole, mais l’expression d’un bonheur dont il ne se croit pas la cause, lui devient bientôt insupportable. Son désespoir s’en irrite, il veut fuir pour en cacher l’excès. Déjà il n’a plus qu’un pas à faire pour être à jamais séparé de celle qu’il adore. Cette funeste pensée l’arrête un instant ; il se retourne, et veut par un dernier regard lui dire un éter-