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regarder comme un excès de confiance amoureuse.

Le commandeur, s’apercevant de l’espèce d’abattement où paraissait être Valentine, s’excusa de l’avoir fatiguée par un aussi long entretien, et voulut se retirer pour lui laisser prendre quelque repos ; mais elle n’y consentit qu’après lui avoir fait promettre de cacher au duc de Linarès qu’elle avait découvert son secret. Il lui en donna l’assurance :

— Comptez sur ma parole, lui dit-il ; j’y serai d’autant plus fidèle que je ne saurais vous trahir sans le désespérer. Jugez-en vous-même.

En finissant ces mots, le commandeur remit à Valentine la lettre suivante, et il sortit.


Anatole à M. de Saint-Albert.

« J’apprends, mon excellent ami, que le marquis d’Alvaro vient d’exposer, au salon du Louvre, le tableau que je lui avais envoyé pour le faire encadrer et vous l’offrir. Je tremble que cette indiscrétion ne me coûte plus que la vie, en apprenant à Valentine mon nom et mes malheurs. La seule idée de perdre avec mon secret jusqu’au souvenir qu’elle me conserve me livre au plus affreux désespoir ; car, il n’en faut pas douter, l’instant qui lui dévoilerait à quel supplice la nature m’a condamné changerait tous ses sentiments pour moi. À la place de ce tendre intérêt, dont je relis chaque jour les témoignages, la