Page:Nichault - Anatole.djvu/244

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sance vous inspirait pour lui, je n’ai pas eu le courage d’en diminuer l’impression, en vous cachant qu’il était aussi digne de votre estime que de votre intérêt. Comment aurais-je pu me refuser au plaisir de voir ses yeux briller de la plus pure joie quand je lui parlais de vous ! Comment n’aurais-je pas été entraîné par la certitude plus séduisante encore de lui faire passer des moments enchanteurs, en lui disant seulement que vous pensiez souvent à lui !

Ici Valentine leva les yeux au ciel, et le commandeur répondit à ce regard en ajoutant :

— Je sens combien cette complaisance vous paraît coupable ; mais, avant de blâmer ma conduite, voyez un peu ce qui la justifie : d’abord, j’étais lié par un serment qui ne me permettait pas d’arrêter les conjectures de votre imagination par le moindre mot qui aurait pu vous faire soupçonner la vérité ; je savais que la loyauté du caractère d’Anatole s’opposerait toujours à ce qu’il vous trompât, et que, loin de profiter de l’intérêt romanesque que son mystérieux amour devait vous inspirer, il vous avait avoué qu’un obstacle invincible le condamnait à s’éloigner éternellement de vous. Ensuite je vous dirai que cet obstacle, qui paraît si insurmontable aux yeux de beaucoup de personnes et peut-être aux vôtres, ne me frappait pas de même. Habitué à voir Anatole depuis son enfance, je me suis plus occupé des avantages qui le distinguent que de la disgrâce qui l’afflige. D’ailleurs, ayant appris sans peine son lan-