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tenter plusieurs moyens de ranimer dans le cœur de Mélanie l’amour qu’elle avait sacrifié au devoir ; mais ce coupable projet faillit me coûter jusqu’à l’estime de Mélanie. Je n’obtins le pardon d’en avoir conçu l’idée que par le serment d’y renoncer à jamais, et plus encore peut-être par le penchant qui m’entraînait à partager sa tendresse pour son fils. Dès-lors l’état de cet aimable enfant devint l’objet de toutes mes sollicitudes ; je fis plusieurs voyages dans la seule intention de courir après de prétendus docteurs dont les journaux attestaient les miracles, et dont les consultations prouvaient l’ignorance. Enfin, lorsqu’il nous fut bien démontré qu’il n’existait aucun moyen de le guérir de cette infirmité, nous prîmes le parti de chercher à en triompher, en confiant Anatole aux soins de ce bienfaiteur de l’humanité, dont les élèves sont autant de prodiges. L’abbé de l’Épée fut bientôt frappé des dispositions inouïes d’Anatole : il prédit tout ce qu’il serait un jour ; mais, pour accomplir une éducation qui lui promettait tant de succès, il exigea du duc et de la duchesse de Linarès une entière confiance, et la promesse de ne déranger par aucune distraction le plan qu’il formait pour son élève. Comme la faiblesse de Mélanie ne lui aurait pas permis de tenir cet engagement dans toute la rigueur nécessaire, elle consentit à retourner avec son mari en Espagne, après m’avoir fait jurer de veiller sur son fils aussi tendrement que s’il était le mien. C’est à ce devoir sacré que j’ai dû