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satisfaction ; mais une inquiétude d’un autre genre l’agitait. La princesse de L…, pour laquelle il avait longtemps réservé la meilleure place, venait d’arriver, et s’était assise sur la seule chaise qui se trouvait libre derrière plusieurs autres femmes. M. de Nangis souffrait le martyre, en voyant la princesse aussi mal placée, et maudissait l’impossibilité de lui offrir le siége d’une autre personne. Heureusement pour lui, madame de Nangis, encore plus touchée de la position pénible où paraissait être son mari, que de celle de la princesse, interrompit la longue ritournelle du grand air italien, pour faire passer un fauteuil auprès d’elle, et y conduire la princesse de L…

Tous ces dérangements importunaient au dernier point la signora B… et l’expression de sa physionomie n’en faisait pas mystère ; mais l’enthousiasme qu’inspirèrent les premiers accents de sa belle voix, la rendirent plus patiente à souffrir les nouvelles contrariétés qui l’attendaient. Une des plus vives fut celle d’entendre sonner toutes les pendules des salons, au milieu du point d’orgue le mieux étudié ; car pour les bravo mal placés, et tous les signes d’une admiration souvent trop bruyante, son indulgence était extrême : on s’aperçoit si peu des inconvénients de ce qui flatte !

Le bruit des applaudissements étant parvenu jusqu’aux antichambres, un domestique crut pouvoir profiter du moment où l’on ne chantait plus, pour aller prévenir la comtesse de l’arrivée de sa belle-