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à voix basse la défense de l’accusée, et l’entremêlait de plaisanteries si piquantes, que les auditeurs riaient encore plus des ridicules de la coupable, qu’ils ne s’indignaient de ses fautes. Ce manége dura jusqu’au moment où la soirée finit. Valentine en vit approcher le terme avec toute l’impatience d’un prisonnier qui attend sa délivrance. Et lorsque ses chevaux l’entraînèrent loin de ce séjour où l’intrigue est un mérite, et l’innocence un ridicule, elle s’écria, le cœur oppressé de larmes :

— Ah ! fuyons pour toujours des lieux où la bonté du souverain ne garantit pas de tant d’insultes, où le moindre succès s’achète par tant d’humiliations ! Je n’y dois plus paraître, puisque le ciel m’a refusé la fausseté, la souplesse et l’audace.



XXXVI


« ANATOLE À VALENTINE.

» Puisque l’ordre m’en vient de vous, j’obéirai, Valentine ; demain, à cette même heure, je serai déjà bien loin de tout ce que j’adore. Ah ! si le tort d’avoir compromis votre repos mérite le plus grand supplice, je le subirai… Mais non, rien ne saurait me punir assez du malheur d’avoir fait couler vos larmes. C’est ma coupable imprudence qui vous livre au ressentiment d’un frère ; c’est avec l’assurance