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chise ; pas la moindre rancune n’était venue troubler les plaisirs d’un retour aussi inattendu ; et le comte venait de la quitter en lui répétant les assurances les plus tendres. Mais tout le prestige avait disparu avec la présence. La réflexion avait succédé à l’ivresse, le soupçon à la confiance, le repentir au bonheur. Les yeux fixés sur le portrait de Valentine, il lui sembla difficile de ne pas regretter tant d’attraits. Une autre incertitude la tourmentait encore. Ce portrait paraissait un gage trop certain de la faiblesse de madame de Saverny, mais avait-il été donné par elle ? Étonnée de n’avoir pas été plus tôt frappée de cette pensée, la comtesse fait appeler sa fille, et lui demande ce qu’est devenu le portrait de sa tante :

— Le voici, répond Isaure, en détachant de son cou le collier que M. d’Émerange lui a rapporté la veille.

La comtesse le prend, confronte les deux miniatures. Dans chacune des deux la pose est la même, mais le costume est différent. Cependant elle croit reconnaître que celle d’Isaure a servi de modèle à l’autre. La supposition que M. d’Émerange la trompe, et qu’elle ne doit peut-être ce portrait qu’à une supercherie, anime ses yeux de colère.

— Je suis sûre, dit-elle à Isaure avec emportement, que vous avez prêté ce portrait à quelqu’un ?

L’enfant effrayée se décide à mentir pour éviter d’être grondée, et se félicite de sa ruse en voyant le