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prendre le parti d’attendre loin de son frère le moment où elle pourrait se justifier des soupçons qu’on osait concevoir contre elle. Mais, pour atteindre à ce but, il fallait s’imposer des sacrifices, et réduire aux plus simples expressions de l’amitié une correspondance qui n’aurait jamais dû être fondée sur un autre sentiment. C’était à cette seule condition que Valentine consentait à recevoir encore des lettres d’Anatole, et elle en parlait déjà comme d’une chose convenue, sans se douter qu’elle demandait l’impossible.

La douleur qui l’accablait se dissipa un peu à l’aspect du plaisir que causa son arrivée chez madame de Rhétel. Le commandeur prétendit que la goutte pouvait s’amuser à ses dépens aussi longtemps qu’il plairait à Valentine de lui servir de garde-malade :

— Car, disait-il en riant, qu’est-ce que cela me fait de souffrir, pourvu que je ne le sente pas.

Cette folie paraîtra bien sensée à tous ceux qui ont reconnu le pouvoir magique de la présence d’un ami sur les souffrances les plus aiguës.

Si la gaieté de M. de Saint-Albert avait bravé la maladie, elle s’éteignit bientôt en écoutant le récit des nouveaux chagrins de Valentine. Il s’indigna de la voir l’objet d’une persécution aussi peu méritée, et, dans son premier mouvement, il voulait écrire à M. de Nangis pour l’éclairer sur l’excès de son injustice, et lui prouver qu’il était de son honneur de la réparer. Mais Valentine le conjura de renoncer à