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Lorsque M. d’Émerange parut, la comtesse prit un air riant pour le complimenter sur son futur mariage et sur le bonheur d’être aimé d’une femme accomplie ; elle se vanta d’avoir prévu que cette provinciale, dont on prétendait se moquer, serait avant peu l’héroïne d’un roman nouveau, qui finirait par le dénoûment ordinaire. Avant de répondre à ces compliments ironiques, le comte chercha à démêler la véritable pensée de madame de Nangis sur cet événement. Il crut un instant que sa fierté l’emportait sur sa jalousie, et que le dédain triomphait de sa colère ; il se réjouissait de lui voir prendre un parti si convenable. Mais le dépit d’une femme, ainsi que son amour, se trahit par ses soins mêmes à le cacher ; et ce fut à la gaieté factice de la comtesse, que M. d’Émerange devina l’excès de son ressentiment. Cette découverte l’engagea à nier l’amour qu’on lui supposait pour la marquise ; il convint seulement d’avoir consenti au projet de M. de Nangis qui mettait la plus grande importance à ce mariage, et en avait fait toutes les démarches, avant même qu’il les eût approuvées. Il ajouta, en regardant finement la comtesse, que des raisons faciles à comprendre l’avaient empêché d’apporter beaucoup de résistance aux volontés de son mari, et que d’ailleurs on lui avait fait sentir la nécessité de se marier, comme étant l’unique rejeton de sa famille.

— Toutes ces considérations, dit-il, m’ont déterminé à laisser agir le zèle de mes amis ; leur choix