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pondre à cent questions sur la santé et les occupations de madame ; après avoir dit que madame avait été indisposée depuis plusieurs jours, j’ai répondu à tout le reste : Je n’en sais rien ; et madame la comtesse, ennuyée de m’entendre toujours répéter la même chose, m’a renvoyée en disant : Quelle sotte !

La marquise n’eut pas l’air de faire grande attention au rapport de mademoiselle Cécile, et feignit de regarder la curiosité de sa belle-sœur comme une preuve de l’intérêt qu’elle portait à sa santé ; mais elle s’affligea en secret de voir jusqu’où s’abaissait la fierté de la comtesse. Qu’aurait-elle donc pensé si elle avait pu deviner que l’excès du ressentiment de cette insensée la porterait ce jour-là même à user de son autorité dans sa maison, pour se faire remettre dans le plus grand mystère les lettres adressées à madame de Saverny. L’espérance d’en trouver une de M. d’Émerange, qui lui apprendrait plus sûrement la vérité de ses rapports avec Valentine, était le seul motif de cette indigne action, dont le vil confident vint bientôt chercher la récompense. Vingt-cinq louis furent le prix de trois lettres remises à la comtesse par un laquais infidèle. De ces trois lettres l’une portait le timbre de Nevers, la seconde était un simple billet d’invitation qu’on pouvait lire sans le décacheter, et, sur la troisième, on ne reconnaissait pas l’écriture de M. d’Émerange. C’était donc inutilement pour cette fois que madame de Nangis venait de se laisser entraîner au plus indigne procédé ; mais elle en