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faites naître. Choisissez la retraite où rien ne saurait m’empêcher de vous suivre ; là, vous pourrez vous convaincre que le bonheur de vous voir, de vous aimer, suffit à mon existence ; et peut-être sentirez-vous alors le besoin de récompenser tant d’amour.

— Oh ciel ! que me proposez-vous ! s’écria Valentine.

En ce moment la porte s’ouvrit, et l’on vit paraître madame de Nangis, pâle, les yeux égarés, et paraissant se soutenir avec peine ; Isaure l’accompagnait et quitta sa main pour venir se jeter dans les bras de sa tante. Les caresses de cette enfant tirèrent Valentine de l’espèce de stupeur où l’avait plongée la subite apparition de la comtesse. Elle essaya de dire quelques mots, mais le tremblement de sa voix trahissait son trouble, et lui donnait un air coupable, tandis que M. d’Émerange, jouissant de toute sa présence d’esprit, s’informait des nouvelles de la comtesse, du ton le plus naturel, et avec toute la sérénité d’une personne qui n’aurait pas eu la moindre chose à se reprocher envers elle. C’est ainsi que l’effronterie met plutôt à l’abri du soupçon que l’innocence.

Le bavardage d’Isaure fut d’un grand secours dans cette circonstance, où chacun parlait au hasard, sans s’embarrasser de ce qu’il disait, pourvu que cela n’eût aucun rapport avec sa pensée ; mais si la présence d’Isaure était appréciée, l’arrivée de madame de Rhétel parut un coup du ciel. Elle venait