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comtesse en tomberait malade, et rien ne manquerait au scandale.

— Que faut-il donc faire pour éviter tant de malheurs ?

— Il faut se résoudre à tromper l’amour-propre du chevalier, ou bien consentir à le satisfaire.

— Vous me supposez trop de finesse, ou trop de résignation.

— Si vous vous décidez au premier parti, je vous réponds du succès ; et, à vous parler sans détour, je ne vois pas ce qui vous empêcherait de prendre le second. Les défauts du chevalier auraient de grands inconvénients pour une femme ordinaire, mais celle dont l’esprit et la beauté flatteront son orgueil, n’aura jamais à en souffrir.

— Il est égoïste.

— Tant mieux ; les égoïstes sont des maris parfaits ; ils ont pour leurs femmes et leurs enfants cette tendre affection qu’ils portent sur tout ce qui fait partie d’eux-mêmes. Je vous proteste que ce défaut, si détestable dans la société, est une vertu de ménage.

— Je ne saurais l’apprécier.

— D’ailleurs, continua M. de Saint-Albert, je vous crois capable d’opérer de grandes conversions ; et puis il y a si peu de différence entre les défauts des gens du monde, que ce n’est guère la peine de les discuter. Le mieux est de ne les pas voir ou de les aimer, et c’est ce que l’amour apprend à merveille.