Page:Nichault - Anatole.djvu/138

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du malheur. On ne peut réfléchir sur la destinée d’un être innocent et constamment malheureux, sans éprouver le besoin d’espérer en cette justice céleste qui doit un jour tout punir et tout récompenser. De cette consolante idée, découlent tous les sentiments religieux, et cette noble résignation de l’âme qui fait regarder les tourments de la vie comme autant de gages d’une éternelle félicité. L’aspect d’une victime de l’amour et du sort ranima ces pensées dans l’esprit de Valentine ; animée d’une piété touchante, elle se prosterna sur les marches d’un autel qui se trouvait en face du tombeau, et là, pénétrée d’un saint respect, elle pria le ciel de lui épargner les tourments d’un amour malheureux, ou de lui inspirer la vertu qui les surmonte.

En implorant la bonté divine sur sa destinée, Valentine éprouva l’attendrissement qui naît du souvenir de ses peines, et de l’espérance de les voir calmées. Son visage embelli par la prière, se couvrit de douces larmes. Elle voulut les cacher à Isaure, et se servit, pour les essuyer, d’un voile de mousseline qui flottait sur ses épaules ; puis se retournant, elle aperçut Isaure, agenouillée à ses côtés, et redisant sa prière du matin ; ne voulant pas la troubler dans cet acte de piété, la marquise ne fit aucun mouvement, et fixa seulement les yeux sur le piédestal qui supportait la statue de Valentine de Milan. Mais elle crut s’abuser, lorsqu’elle vit au bas de la devise incrustée dans le marbre, ces mots tracés au crayon :