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quel droit m’imposerait-il le sacrifice des soins qu’un autre peut m’offrir ? Certes, je n’encourage pas ceux du chevalier, et ne cache pas même assez à quel point je les redoute ; mais si des motifs qui me sont personnels m’engagent à détruire ses espérances, je n’en veux recevoir l’ordre de personne.

C’est ainsi que la fierté de Valentine s’indignait de l’empire qu’Anatole se croyait déjà sur elle. Tant de despotisme lui semblait autorisé par la faiblesse qu’elle avait eue de recevoir ses lettres après l’aveu qu’il avait osé lui faire, elle se reprochait même d’avoir répondu à la première, et plus encore, de s’être laissée tromper par l’apparence de cette respectueuse soumission qui paraissait devoir la rassurer sur tous les sentiments d’Anatole. Cependant elle aurait bien voulu accorder les intérêts de son cœur et ceux de sa dignité ; mais son imagination chercha vainement un moyen d’instruire Anatole de l’indifférence que lui inspiraient tous les agréments du chevalier, sans qu’elle fût obligée de se justifier elle-même du tort de le trouver aimable.

Une visite du commandeur vint très à propos la tirer de cet embarras. Il s’aperçut bientôt du ressentiment qu’elle tâchait de dissimuler, et sans en demander la cause, il s’amusa à la deviner ; il parla d’abord des folies de madame de Nangis, comme d’un sujet très-propre à donner de l’humeur ; mais Valentine se mit à excuser la comtesse avec tant de douceur et d’indulgence, que le commandeur se dit :