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verrez surgir des familles qui, dans les immondices du ruisseau, cherchent les détritus culinaires destinés aux chiens errants, et dont pères, mères, enfants, font leur profit ; les balayures de magasin leur appartiennent : le beau papier ne sort-il pas du chiffon comme le noir animal de l’os calciné ?

Pauvres industriels, leur métier les fait se traîner dans la boue, et facilement chez eux l’âme et le corps fléchissent ensemble sous le poids de la misère. Néanmoins, la corporation des chiffonniers s’est constituée, et son comité, par l’obole du malheur, vient en aide aux plus nécessiteux. Il y a, parmi ceux-ci, des débris de toutes les gloires déchues. Gens de lettres, hommes titrés, femmes galantes, enfants abandonnés : ce que la charité rejette, le chiffonnage le ramasse ; mais l’on proscrit en bloc la masse pour se dispenser d’un triage partiel…

Triste logique ! rigoureux ostracisme, qui précipite les meilleurs dans un abîme où la vertu reste enfouie !!! Certes, l’aumône se fait des deux mains à Paris ; mais est-ce par l’aumône que l’on doit relever la misère, et la solidarité de tous ne profite-t-elle pas mieux à chacun que l’assistance publique ?