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à la paresse et place celui qui la reçoit sur la pente du vice. Mais comment repousser un enfant qui demande au nom de sa mère, ou pour acheter du pain ?

Le pire malheur du bas peuple, est le gain qu’il tire de son jeune entourage, en l’immolant à la nécessité, cette loi de vie. Qui n’a vu, pendant les froids les plus rigoureux de l’hiver, de pauvres enfants, échelonnés sur les ponts, crier de leur voix grelottante, aux heures avancées de la nuit : « À un sou, la boîte d’allumettes, à un sou. » Sans appui, sans abri, par la neige, le vent ou la pluie, ces petits êtres, succombant à la lassitude, s’endorment debout et crient en rêvant : « À un sou, la boîte d’allumettes, à un sou. »

Et pour quiconque se souvient de ce divin précepte, en vertu duquel l’humanité ne doit être qu’une famille ; pour qui, ne regardant point au-dessus, mais au-dessous de soi, se reconnaît solidaire envers les pauvres, combien de douleurs n’éprouvera-t-il pas ? Nous avons vu, bien souvent, de petites filles servir de garde-malades à leur mère avec toute l’intelligence de cœurs expérimentés. Ce qu’elles ne comprenaient pas, ces enfants le devinaient, et leur charmante physionomie se flétrissait à l’âge où elle eût dû s’épa-