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Tante Gertrude



CHAPITRE PREMIER


— La voilà ! la voilà !

Et un brouhaha indescriptible suivit cette exclamation. On se pressait, on s’écrasait pour apercevoir la mariée qui s’avançait lentement au milieu d’un nuage de tulle et de dentelles. Sans respect pour le lieu saint, les uns grimpaient sur les chaises, d’autres même se risquaient sur la rampe des balustrades qui séparaient la nef des bas-côtés ; tous voulaient voir.

Là-haut, l’orgue, touché par une main habile, faisait éclater soudain ses notes triomphales, couvrant le bruit des chaises, le tumulte des curieux. Le cortège des invités s’était formé : les couples se succédaient, les toilettes claires des demoiselles d’honneur faisant un heureux contraste avec les robes de velours sombre et les habits noirs. Mais la foule, indifférente à ces élégances, n’avait d’yeux que pour la mariée, ne s’occupait que d’elle seule. C’est que ce mariage était un véritable événement dans la petite localité d’Ailly. M. Wanel, le riche fabricant de serrurerie, le plus gros bonnet du pays, épousait Mlle Paule de Neufmoulins, citée partout pour sa merveilleuse beauté, mais n’ayant pour toute fortune que ses quartiers de noblesse. Mlle de Neufmoulins était orpheline. Sa famille s’était toujours opposée à cette union, mais la jeune fille, parvenue à sa majorité, avait passé outre.

Dans l’église, le calme s’était fait peu à peu, la messe commençait ; les accents du violoncelle et