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maine à bout, nous enseigne combien les dons de l’intelligence eux-mêmes deviennent méprisables, quand l’élévation du cœur ne répond point à la puissance de l’esprit.

À l’époque de la seconde restauration, Benjamin Constant était naturellement devenu, dans la presse et à la tribune, l’ennemi irréconciliable d’un gouvernement dont la vue seule, comme un reproche vivant, lui rappelait ses palinodies. Le camp révolutionnaire, peu difficile sur le choix de ses auxiliaires et les jugeant comme on juge une arme par le tranchant de la lame et la finesse de la pointe, accepta sans scrupule le secours de cette parole caustique et mordante, et de cette plume finement taillée qui avait besoin de trouver la restauration coupable pour s’excuser elle-même. Les écrivains de la Minerve, du Constitutionnel, et Benjamin Constant lui-même, ont publié des pages politiques dont l’intérêt éphémère n’a pas survécu aux circonstances et aux passions qui les avaient inspirées. Il y a ainsi, dans chaque époque, une littérature de circonstance qui meurt avec le tour d’opinion qui l’avait fait naître. Mais en s’enfonçant plus profondément dans le camp révolutionnaire, on rencontre un auteur qui a trouvé, dans un talent original, le secret d’écrire quelques pages durables sur des choses d’un intérêt passager : c’est Paul-Louis Courier.

C’est ici le cas d’étudier, dans sa personnification la plus puissante, cette forme de la littérature politique qu’on appelle le pamphlet. Parmi les hommes qui