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famille[1]. Émigré pendant la première révolution, il avait servi dans l’armée de Condé. Rentré en France en 1802, il prit la carrière du barreau. Tandis que M. Lainé croyait à l’existence des libertés publiques par la monarchie, M. de Serre croyait à l’existence de la monarchie par les libertés publiques. Le point de départ de ces deux hommes éminents était différent, mais ils étaient arrivés à peu près sur le même terrain politique ; seulement M. Lainé craignit le premier pour la monarchie ; M. de Serre poussa l’expérience plus loin, et fit partie du ministère Dessole, qui remplaça en 1819 le ministère dont le duc de Richelieu était le chef et M. Lainé l’orateur. Mais, après un peu de temps, les mêmes écueils qui avaient arrêté M. Lainé lui apparurent ; il vit la conspiration révolutionnaire masquée derrière les hommes qui voulaient sincèrement l’union du pouvoir et des libertés, et son âme honnête se révolta à l’aspect des garanties dues la monarchie, tournées contre elle comme des batteries destinées à la foudroyer. Dans ces occasions, son éloquence, qui avait quelque chose de fébrile et de maladif, s’élevait aux plus grands accents. Malgré un débit un peu difficile, l’indignation le faisait orateur. Sa parole avait les qualités éminentes qui dominent les assemblées, la spontanéité, l’éclat, la chaleur, la passion ; seulement elle ne se possédait pas toujours elle-même, et les interruptions, comme ces obstacles impuissants qui précipitent

  1. Il était né à Metz en 1777.