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d’ennemis ne fut oubliée dans ses ouvrages. Sa haine parla à toutes les passions, et il donna l’assaut a la monarchie avec toutes les forces de ses adversaires et par tous les points à la fois. Cela est si vrai, que l’on pourrait trouver dans ces chansons si inoffensives, au dire de l’avocat, la classification complète des partis qui agitèrent cette époque de notre histoire, et l’ensemble des moyens employés, soit à la tribune, soit dans la presse, soit en dehors de ces deux voies, pour renverser la société religieuse et monarchique.

La restauration, à son retour, satisfaisait à une nécessité impérieusement ressentie par la France comme par l’Europe entière : la paix, qui devait fermer tant de blessures et rendre du sang et de la vie à cette société épuisée par la guerre, la paix était le besoin de l’époque ; les hommes d’État avaient l’intelligence de cette vérité, les peuples en avaient l’instinct. M. Béranger lui-même partageait sur ce point l’avis de tout le monde ; son Roi d’Yvetot, composé vers la fin de Bonaparte, est une satire peu équivoque des rois belliqueux et des règnes conquérants. Ce roi dormant fort bien sans gloire, ce roi fort peu connu dans l’histoire, ce roi pacifique et débonnaire, chanté en face de Napoléon, disait assez que M. Béranger blâmait l’empire, condamnait la guerre, désirait la paix. Quand la restauration vient répondre au vœu du poëte et donner la paix à la France, que fait M. Béranger ? Oh ! alors il ne chante plus le Roi d’Yvetot. Son génie, plein de contradictions, devient tout à coup belliqueux ; la chanson