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oppressive sous le Directoire, après avoir été brutalement sanglante sous la Convention, commença à déporter lorsqu’elle cessa d’élever des échafauds. La loi que Napoléon renversa, c’était une illégalité antérieure ; la liberté qu’il détrôna, c’était déjà l’arbitraire. Au fond, il remplaça un despotisme énervé, infécond, et qui pourrissait la conscience et les mœurs du pays, par un despotisme plus sain, plus fort, plus habile et plus glorieux, celui du consulat. Il est difficile d’avoir étudié l’histoire sans avoir la conscience de cette vérité et sans comprendre qu’il n’y a de libertés possibles que sous un gouvernement légitime, qui respecte partout le droit qu’on respecte en lui ; mais, dans le temps où écrivait M. Delavigne, le mot d’ordre des chefs de l’opposition était de persuader à l’opinion que la révolution avait fondé, après la chute de Robespierre, un état de choses régulier, légal et libre, qui ne demandait qu’un peu de temps pour se consolider ; de sorte que, pour le bon exemple, Bonaparte, au lieu d’avoir succombé, parce qu’il était arrivé à la fin de la phase de despotisme militaire qui avait sa place logiquement marquée dans la marche générale de la révolution, devait mourir à Sainte-Hélène pour avoir violé la légalité et la liberté que représentait si dignement Barras, le héros du 18 fructidor. C’est ainsi que l’ode à Napoléon devenait, à un certain point de vue, une ode rétroactive à la charte.

Presque toutes les poésies de M. Casimir Delavigne sont marquées du même caractère. Dans le Voyageur,